Article de la CNA répondant aux délibérations sur l’accès au droit de la Conférence des Premiers Présidents
ASSEZ
La défense sera-t-elle toujours bafouée, sera-t-elle toujours considérée comme un frein à l’accès au droit sans que ne se lève l’ensemble des Avocats pour rappeler que notre raison d’être, notre mission est de défendre la liberté contre toute erreur judiciaire ou arbitraire, de favoriser la mission de justice de nos Tribunaux, justice qui doit être rendue de manière neutre, impartiale et égale au nom du peuple français par les Juges.
Contrairement aux affirmations du corps des Premiers Présidents, le cœur de métier du Juge n’est pas seulement d’intervenir dans des domaines juridiques dits « nobles » mais d’accompagner, au nom du peuple français, les citoyens afin de permettre un règlement équitable de leurs litiges.
Force est de constater que les propositions des Premiers Présidents n’ont pour but que de déjudiciariser des pans de l’activité sociale en laissant le soin
à des officiers ministériels enfermés dans leur clientélisme (notaires et huissiers), à des administrations et fonctionnaires soumis à la tutelle de l’exécutif,
à des assureurs jaloux de leur position dominante à l’égard de leurs assurés,
de décider de manière nécessairement partiale du sort des litiges nés de rapports sociaux.
L’on se trouve éloigné des principes fondamentaux édictés par l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme qui prône que tout citoyen a droit à un procès équitable devant un Tribunal indépendant et impartial.
Il est intellectuellement malhonnête d’affirmer que les droits d’accès à la justice des citoyens ne seraient pas diminués dans la mesure où demeurerait un recours devant les juges.
Car, au premier degré de connaissance des litiges, c’est livrer le règlement de ceux-ci à la partialité de certains qui de par leur fonction ou leur activité ne peuvent avoir qu’une vision déformée de la solution préconisée.
Donner aux Notaires le droit de vue de décision sur les divorces par consentement mutuel, c’est automatiser les conditions de rupture du lien matrimonial en négligeant l’aspect humain de cet accident de la vie.
Abandonner aux Notaires la liquidation des régimes matrimoniaux, c’est privilégier cette profession sans raison particulière liée à un critère de compétence au détriment des Avocats spécialisés dans ce domaine.
Accorder aux assureurs le droit, sans contrôle, d’indemniser les dommages nés d’accidents de circulation sur la base de barèmes préétablis, c’est porter atteinte au principe de la personnalisation des dommages et ainsi affecter les droits individuels des victimes.
La règle protectrice des droits des citoyens doit impérativement passer par la représentation obligatoire par Avocat dans tous types de litiges et tous les modes de traitement de ceux-ci.
Et s’agissant des procédures alternatives, il est certes intéressant, qu’elles constituent un préalable à tout traitement judiciaire des litiges sous condition cependant de la présence obligatoire de l’Avocat, garant des droits individuels.
La position prise par la Conférence des Premiers Présidents apparaît d’une manière générale contraire à l’idée française d’une justice impartiale.
Car l’impartialité doit être synonyme de justice.
Et rétrécir le domaine de la justice
en la confiant à des personnes enfermées dans la logique étroite de leur fonction ou activité économique non représentatives du peuple français que sont les Juges,
en favorisant « les arbitrages discrets », qui sont une forme de contrebande du droit (cf. « Droit au Juge » de Marc VARAUT),
écarte les citoyens des marches du Palais de Justice et les incite à transiger, dans des conditions souvent inéquitables, en l’absence de protection d’Avocats défenseurs de leurs droits, et partant, à subir la loi du plus fort.
La Confédération Nationale des Avocats entend affirmer fermement
qu’il n’y a pas de défense équitable et protectrice sans la représentation obligatoire des Avocats dans tous types de litiges et tous modes de traitement de ceux-ci, qu’il s’agisse de procédure judiciaire ou alternative.
que le Juge est le seul arbitre des litiges parce qu’il n’a point de pair ni d’égal, qu’il constitue le garant d’une impartialité par son indépendance.
que le Juge, émanation de la souveraineté populaire ne saurait être remplacé par quiconque qui ne soit point tenant du pouvoir régalien de justice.
que la fonction de justice doit allier à la fois le Juge qui dit le droit et les Avocats qui préservent l’intérêt des citoyens dans le respect du principe du contradictoire.
Au-delà des ces règles, ce n’est qu’approximation et arbitraire contraire à l’esprit républicain.
Toulouse, le 12 juillet 2013.
Jean de CESSEAU,
Président d’honneur.