CONTRIBUTION DE LA CNA A LA REFORME DE LA POSTULATION
Monsieur le Président WICKERS, par lettre du 2 février, a appelé l’ensemble de la profession à lui faire part de ses observations sur les trois thèmes suivants :
La territorialité de la postulation
Le maintien du tarif de la postulation
La communication électronique civile et pénale
La Confédération Nationale des Avocats considère que ces sujets touchent à l’essentiel pour la grande majorité des avocats français et qu’une telle réflexion ne peut être organisée dans la précipitation.
Il appartient aux représentants de la profession d’exiger des Pouvoirs Publics de disposer d’un temps utile à la réflexion propre à recueillir sur un tel sujet l’opinion du plus grand nombre.
Il n’est pas admissible que la représentation nationale des avocats soit appelée par les Pouvoirs Publics à prendre des décisions aussi capitales pour le devenir des avocats dans l’urgence.
La Confédération Nationale des Avocats, constate que les questions posées aujourd’hui, ne peuvent être isolées de celles posées également par la réforme de la procédure civile, tant en première instance qu’en cause d’appel. La Confédération Nationale des Avocats a été la première à mettre en avant, dès 2006, le constat du CEPEJ révélant aux yeux de l’Europe toute entière l’état de nécessité dans laquelle se trouve la justice française particulièrement en matière civile et pénale.
La Confédération Nationale des Avocats considère que l’ensemble des projets actuels n’a d’autre fondement et d’autre but que, d’une part, gérer la pénurie et d’autre part transférer les charges du service public sur les avocats.
La C.N.A. tenait à faire ce rappel avant de répondre plus précisément aux trois questions posées :
I – TERRITORIALITE DE LA POSTULATION
Certains considèrent que la modernité liée à globalisation, l’internationalisation des échanges, à l’urbanisation, voudraient que soit imposé de regrouper tant les juridictions que les barreaux.
Cette analyse ignore la dimension politique de l’aménagement du territoire dans un pays où, depuis plus de 10 ans, les communes de moins de 1500 habitants sont celles dont la population augmente le plus. Ce dont la justice française a besoin ce n’est pas de la rationalisation de la pénurie, c’est une ambition où la justice civile réponde aux attentes de nos concitoyens et notamment d’efficience sans déshumanisation, la procédure ne peut se réduire au simple problème de la communication des pièces et échanges des écritures.
La procédure a non seulement pour objet, bien évidemment, sa mise en état mais surtout de permettre aux parties d’avoir le temps et les moyens d’administrer la preuve de leurs prétentions.
Cela suppose donc, au stade de la mise en état, que les avocats, représentants des parties, puissent débattre effectivement de ces incidents.
Il convient de rappeler que le mandat donné à un professionnel du droit, en particulier le mandat ad litem, présente une forte spécificité juridique, marquée notamment par l’existence de règles spécifiques dans le Code de procédure civile, qui complètent les dispositions du Code civil applicables au contrat de mandat .
Son objet est principalement l’accomplissement de ces actes juridiques particuliers que sont les actes de procédure au nom du mandant.
L’avocat a alors le pouvoir d’engager son client et, en contrepartie, il en assume la responsabilité. Cette partie de l’activité de l’avocat est donc plus aisément circonscrite que le conseil et l’assistance, forme de prestations de services, qui se plient mal à une tarification a priori et sont plus justement rémunérées en fonction des diligences effectivement accomplies, cette dernière question étant développée dans le paragraphe suivant.
Les parties doivent disposer d’une juridiction dont la répartition assure un véritable maillage du territoire.
Les avocats, tel qu’ils sont établis aujourd’hui, assurent cette représentation de nos concitoyens auprès de nos Tribunaux de Première Instance aujourd’hui et d’Appel demain.
Supprimer, dans la précipitation, d’un trait de plume, la territorialité actuelle de la postulation provoquerait immédiatement une grave crise dans le barreau français, dès lors notamment, que bon nombre d’institutionnels regrouperaient dans quelques grands barreaux, l’ensemble de la gestion de leurs contentieux.
Bon nombre de nos confrères déjà atteints par la crise financière et industrielle actuelle se retrouveront en état de cessation de paiement. Le maillage du territoire par de nombreux cabinets ne serait plus assuré.
En cet état la Confédération Nationale des Avocats s’oppose en conséquence à une disparition de la territorialité de la représentation.
II – MAINTIEN DU TARIF DE POSTULATION :
La Confédération Nationale des Avocats vous renvoie à l’article commun qu’Alain PROVANSAL, Président de l’A.A.P.P.E. et Vice-Président de la CNA, et Jean-Louis SCHERMANN, Président de la CNA ont publié, dans la Gazette du Palais, du mois de mai 2008, à partir notamment d’un substrat des Professeurs CROZE et NOURISSAT.
La C.N.A. a joint également l’offre de décret que l’A.A.P.P.E. et la C.N.A ont établi en joignant la dernière version telle qu’arrêtée par le Bureau de l’A.A.P.P.E., en accord avec la C.N.A., sous la réserve d’une modification de l’article 33.1.
III – COMMUNICATION ELECTRONIQUE, CIVILE ET PENALE :
Comme indiqué ci-dessus, la communication est un moyen et ne saurait être une fin en soi. La C.N.A. considère essentielle l’exigence qu’en matière civile les parties puissent disposer de moyens réels d’administration de la preuve.
Pendant des années, nous avons assisté à une inflation d’ouvertures d’instructions pénales au seul motif que les parties pouvaient ainsi bénéficier des pouvoirs d’investigation à nul autre pareil des juges d’instruction.
Plutôt que de répondre à cette exigence d’administration de la preuve, les textes ont rendu plus difficile l’accès au juge pénal sans répondre aux besoins des justiciables en matière de preuve.
En conséquence, la Confédération Nationale des Avocats, comme indiqué ci-dessus, si elle approuve bien évidemment l’usage des moyens modernes d’échange de pièces et d’actes de procédure, considère que cela ne doit pas se traduire par une déshumanisation de la procédure. Tout au contraire, la maitrise des procédures par les parties et les exigences de l’administration civile de la preuve rendront d’autant plus nécessaire la présence des avocats aux audiences de mise en état.
PJ : Article commun des Présidents de l’AAPPE et la CNA Projet de décret