Réforme des retraites : Questionnaire de la CNA destiné aux Parlementaires
La Confédération Nationale des Avocats a établi une note concernant la réforme des retraites, après avoir pris connaissance des informations données par Le Haut-Commissariat à la Réforme des Retraites, entendu Monsieur DELEVOYE lors de son intervention à l’UNAPL et été reçue par M IZARD.
La CNA héritière de l’Association Nationale des Avocats fondée en 1921 est à l’origine de la création de la Caisse Nationale des Barreaux Français.
Notre première question est directe pour quelles raisons les avocats, qui dépendent d’une caisse totalement autonome équilibrée solidaire et performante, devraient être regroupés dans un régime unique dit régime universel ?
La caisse des avocats est particulière à plusieurs titres, les avocats y sont attachés et ne souhaitent pas être regroupés dans un régime universel.
1°) La CNBF réunit exclusivement les avocats quel que soit leur statut ; libéral exerçant à titre individuel, salarié d’un autre avocat, associé d’une structure professionnelle.
2°) La démographie professionnelle des avocats est largement excédentaire.
3°) Le régime de base de la CNBF assure une véritable solidarité entre les avocats puisqu’à ancienneté égale tous les avocats reçoivent une pension identique. Cela est possible d’une part par les cotisations payées par les plus fortunés au profit de ceux qui n’ont pas eu les mêmes revenus et d’autre part par le droit de plaidoirie.
Cette solidarité les avocats l’ont souhaité dès la création de la première caisse en 1938.
Depuis un régime complémentaire par point a été institué à la fin des années 70.
Dans les années 80 une sur-complémentaire volontaire et déductible a été proposée, en quelque sorte de la Madelin avant la Madelin. Système aujourd’hui fondu dans le régime complémentaire.
Cela permet aux avocats de bénéficier de pension complémentaire dont le ratio cotisations/ pensions est l’un des plus performants.
4)° Les frais de fonctionnement de la CNBF sont parmi les plus faibles et bien inférieurs à la norme arrêtée par les autorités de tutelle.
Cela est possible par une gestion rigoureuse mais aussi par la taille de notre caisse, qui est une petite, qui gère environ 100.000 personnes en tenant compte des avocats en exercice des retraités et de personnes qui auront cotisé à un moment au sein de notre régime.
Ce type de structure est plus à même de déceler les dérapages dans les dépenses.
Sur cet argument nos interlocuteurs du HCRR nous ont répondu que là n’était pas la question lorsque l’on traite de régime des retraites qui représente une charge nationale annuelle de 360 milliards, de sorte que celle des frais de gestion qui représente (suivant leurs dires) 5% est marginale.
Permettez-nous de ne pas être d’accord.
5% de 360 milliards cela représente 18 milliards. Une économie de 10% sur les frais de fonctionnement, ce qui est tout à fait possible, représente 1.8 milliard, 20% d’économie, ce qui n’est pas impossible, représente 3,6 milliards.
Pour les avocats ce chiffre représente quelque chose de précis à savoir le montant du budget des services judiciaires de l’Etat, dont nous savons que pour être comparable à ceux de nos voisins européens il devrait être doublé.
Voilà une économie qui donnerait à notre justice des moyens performants au bénéfice de nos concitoyens.
Pour parvenir à de telles économies notre Caisse confirme qu’ « être petit c’est merveilleux ».
5°) Les avocats gèrent eux-mêmes leur caisse au profit des avocats, mais ils le font aussi au bénéfice de nos concitoyens par le mécanisme de la grande compensation nationale.
Les avocats sont les professionnels qui versent le plus au profit des régimes en déséquilibre, 85 millions par an, ce qui représentait en 2018 un versement de la part de chaque avocat au nom de la solidarité nationale 1.356€ par an.
6°) Les avocats ont constitué des réserves qui leur appartiennent à hauteur de 2 milliards, somme qui garantit le régime de base à hauteur d’un tiers et le régime complémentaire pour les 2/3 de ce montant.
Nos actuaires, en retenant une évolution démographique moins optimiste que celle de ces dernières années, considèrent que ces réserves assurent entre 40 et 50 ans de versement de pension, c’est-à-dire qu’en l’état un jeune professionnel est assuré par les réserves constituée par ses anciens de toucher sa retraite.
C’est donc sur ces bases que nous avons pris connaissance du projet.
Bien entendu les avocats sont favorables à participer à une réflexion sur la retraite en raison de l’évolution des métiers et de la mobilité professionnelle.
Bien entendu il faut apprécier d’une part l’allongement de la durée de la vie et d’autre part une entrée dans la vie active plus tardive pour beaucoup en raison de l’allongement des formations initiales.
Bien entendu il faut mesurer les conséquences des interruptions d’activité qui font peser sur les régimes chômage le poids des cotisations.
Bien entendu il faudra demain encore plus appréhender les conséquences des interruptions de carrière sans doute plus nombreuses pour ceux qui voudraient reprendre une formation notamment après un échec dans le parcours traditionnel avec une véritable école de la seconde chance.
Mais cela ne doit pas passer par la disparition de la CNBF, caisse bien gérée, équilibrée et solidaire tant à l’égard de avocats par le mécanisme particulier de notre régime de base exceptionnelle qu’à l’égard de tous nos concitoyens par l’effort sans comparaison que nous fournissons au titre de la compensation nationale.
Notre seconde question porte sur les explications chiffrées que nous attendons sur le nombre de plafonds de la sécurité sociale auxquels seront soumis nos revenus au titre du régime de base dans le régime universel. Notre note étant précise sur les conséquences pour les avocats en particulier mais également pour les autres libéraux.
Le projet qui nous est présenté nous conduit à considérer que le véritable objectif de la création d’un régime universel, est de transférer un déficit du budget de l’Etat vers les tous les cotisants de tous les régimes.
Actuellement le régime des fonctionnaires est totalement distinct de celui des autres cotisants.
En 2017 le coût des retraites des agents de la fonction public représentait une dépense de 60 milliards dans le budget de l’Etat. A hauteur de 30 milliards l’Etat alimentait cette dépense par le prélèvement sur le traitement des fonctionnaires actifs. Le déficit qui en résulte, 30 milliards, est donc couvert par le budget ou plus exactement par le déficit du budget dont ce montant correspond à 40% du déficit total.
Demain c’est l’ensemble des cotisations prélevées qui permettra de payer les 360 milliards de dépenses. Cela signifie que les 30 milliards manquant pour le traitement des fonctionnaires retraités seront à la charge de tous non plus par l’impôt mais par les cotisations.
Devant l’UNAPL, M. DELEVOYE nous a déclaré sur la question du nombre de PASS soumis au régime de base avant de cotiser à un régime complémentaire, que compte tenu du poids des fonctionnaires ce nombre passerait d’un PASS à trois PASS.
Malgré nos demandes nous n’avons aucune information sur les justifications financières de ce nombre pourquoi 3 pourquoi pas 1 ,5 ou 2.
Les services du Haut-Commissariat nous ont même servi une justification inexacte (voir notre note).
Nous sommes donc fondés à réclamer des justifications financières précises, d’une part, quant au seuil des 3 « PASS » (en d’autres termes pourquoi 3 et pas moins).
Notre troisième question porte sur les taux de prélèvements et sur la valeur prévisible du point de retraite du régime universel.
Nous n’avons aucune explication.
Notre note est précise sur la situation actuelle à partir d’un même revenu pour un avocat, un autre libéral (en dehors des médecins) et un salarié.
Avec le régime universel les avocats risquent de payer 2 à 3 fois plus de cotisations pour toucher moins que leur pension de base actuelle.
Ces questions sont primordiales nous n’avons aucune information.
Notre quatrième question porte sur les réserves.
Elles représentent 2 milliards pour les avocats avec les autres libéraux cela représente 25 milliards sur un montant total de réserves de 165 milliards soit 15%. Pourtant les libéraux sont loin de représenter 15 % des cotisants hors fonction public. Vous comprendrez que le sort de ces réserves est primordial.
Pour nous comme pour les autres ces réserves appartiennent à ceux qui les ont constituées.
Notre cinquième question est en fait une proposition.
A supposer que nous soyons tous dans un régime universel, dont rien ne justifie que l’assiette de la retraite de base soit portée à 3 plafonds plutôt qu’à 2 voire moins, nous devrions pouvoir continuer à proposer à nos confrères une retraite complémentaire particulière.
Elle pourrait prendre la forme d’une retraite par capitalisation gérée par la profession dont les réserves actuelles serviraient de garantie en ce qu’elles seraient logés dans un autre fonds spécifiques et distinct également géré par la profession.
Il est même possible que plusieurs professions libérales se regroupent le cas échéant.
Notre sixième question a un caractère subsidiaire sur la gestion du régime universel, car nous nous plaçons dans le maintien de notre régime.
Nous croyons en effet que notre caisse a fait la preuve de son efficacité, les avocats ayant toujours su répondre aux exigences de la solidarité par le mécanisme de la compensation.
Il est donc clair que nous ne souhaitons pas entrer dans le mécanisme du régime universel.
Pour le prix de leur indépendance il est certain que les avocats seraient prêts à discuter demain du montant qui pourrait être appelé au titre de cette compensation nationale.
Si pourtant nous sommes obligés d’entrer dans ce régime universel pour le seul régime de base et ce sous la réserve du nombre de plafonds et sous la possibilité de mettre en place demain un régime complémentaire spécifique, quelle place les avocats et les libéraux en particulier auront dans la gouvernance du régime universel.
Cette question est légitime car si nous avons su créer des réserves à hauteur de 15 % de leur montant total, voire 25% si l’on ajoute tous les indépendants, nous sommes loin de représenter 15 voire 25 % du nombre total de cotisants.
Ainsi nous risquons malgré le poids économique que nous continuerons à représenter, notamment au regard du montant de nos cotisations, nous sommes assurés de n’avoir que des strapontins dans la gestion de ce régime.
Quel mécanisme sera mis en place pour donner aux libéraux une place réelle dans la gestion du régime universel ?
Sommes- nous assurés demain de représenter 15 %voire 25% des sièges de l’organisme de gestion ?
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