Observations sur le guide pratique de l’activité d’avocat mandataire en transaction

Projet présenté par la commission des règles et usages du CNB le 15 mai 2014

 

 

I – Le Mandat « ad nutum »:

Il est rappelé dans le chapitre 1 (rappel des principes) :

Que le mandat de l’avocat est par nature ad nutum ; la jurisprudence elle-même évolue pour les mandats des agents immobiliers vers une révocabilité de plus en plus simplifiée.

Il nous apparaît que l’application du principe de la révocabilité ad nutum du mandat de l’avocat est incompatible avec le mandat exclusif à durée déterminée.

A défaut, un client donnerait un mandat exclusif à un avocat et dès qu’il trouverait un client après que l’avocat aura fait toute la publicité autour du bien, il suffirait au mandant de révoquer le mandat et de vendre le bien en direct. On ne peut pas concevoir cela :

            – soit on autorise l’avocat à exercer à titre accessoire cette activité et on lui donne les moyens de le faire,

            – soit cette activité reste le territoire naturel des agents immobiliers et des notaires, et dans ce cas, on n’en parle plus.
 

L’avocat pouvant exercer l’activité d’avocat mandataire en transaction immobilière à titre accessoire, cela signifie que l’avocat devient un acteur incontournable dans le marché de l’immobilier dans lequel il va se trouver en concurrence avec les agents immobiliers et les notaires.

Il faut donc permettre à l’avocat de prendre des parts de marché et celui-ci doit se distinguer par sa compétence, son expertise en matière juridique et sa déontologie. 

Dès lors, il est nécessaire que l’avocat ait au moins les mêmes droits que l’agent immobilier et que son contrat de mandat bénéficie au minimum des mêmes garanties (déjà très écornées) que celui de l’agent immobilier.

Dès lors, il faudrait qu’exceptionnellement dans le cadre de cette activité, le mandat de vente obligatoirement écrit donné à l’avocat, échappe à la règle de notre mandat habituel.

A tout le moins, il faudrait que le guide pratique ne précise pas la nature ad nutum de notre mandat ce qui laisserait quelques chances de voir une évolution jurisprudentielle favorable pour nous qui s’appuierait sur l’article 1134 du code civil.

Même si aujourd’hui le juge remet en cause le principe du respect des contrats entre les parties nous devons espérer une évolution jurisprudentielle qui reviendrait vers une application plus stricte de l’article 1134.

Il faudrait alors que les avocats puissent bénéficier de cette évolution jurisprudentielle.

Par ailleurs, à la page 15 sur la durée du mandat, il est indiqué que le mandat se renouvelle par tacite reconduction pour une durée indéterminée sauf par dénonciation d’une des parties par LRAR adressée au moins 15 jours avant l’arrivée du terme.

Il semble que cette reconduction contredise le principe de la révocation ad nutum.

Il apparaît donc bien que la convention signée en l’espèce doit prévoir que le mandat de l’avocat ne peut être révocable ad nutum.

Il ne faudrait pas que  l’avocat soit autorisé  à pratiquer cette activité sans être autorisé à la pratiquer dans des conditions comparables à celles des autres acteurs du secteur.

 

CONCLUSION

Le mandat ad nutum est difficilement conciliable avec le droit au mandat exclusif à durée déterminée.

 

    II – Concernant la rémunération de l’avocat :

 

Ici encore si on ne permet pas à l’avocat de facturer sa prestation seulement en cas de réussite de la vente du bien nous ne serons pas concurrents sur le marché par rapport aux notaires et aux agents immobiliers. L’avocat qui accepte un mandat de transaction immobilière va exercer cette activité en sa qualité d’avocat en respectant sa déontologie, ce qui le différencie déjà des agents immobiliers.

Nous pourrions parfaitement déroger à la règle de fixation des honoraires d’avocat en la matière, et prévoir un honoraire seulement sur le résultat de la vente qui engloberait bien évidemment la prestation juridique de la même manière que pourrait le faire les notaires.

L’honoraire de résultat prévu en transaction immobilière ne peut pas recevoir la même interprétation que l’honoraire facturé par un avocat en cas de réussite d’un procès ou d’une négociation. Dans ce cas, il faudrait faire une exception pour que les honoraires soient des honoraires de résultat en cas de réussite.

Il faut tout de même que nous soyons conscients que l’obligation d’information et de conseil juridique de l’avocat qui se livre à cette activité est évidemment importante et sera analysée de manière très stricte en cas de litige, car les clients sont en droit d’attendre de leur avocat l’exercice de cette activité avec leur compétence professionnelle.

 

III – Concernant la prestation spécialisée pour les visites :

Le guide pratique précise la possibilité aux avocats de recourir à l’aide de prestataires spécialisés.

Cette notion devrait être précisée, notamment sur la qualité de ces prestataires et les modalités de leur rémunération. Un encadrement de cette prestation serait judicieux.

En effet, c’est la porte ouverte à beaucoup de dérives.

Il est précisé que l’avocat apporteur d’affaire ne peut se concevoir. Ce qui est une excellente chose.

Mais il faudrait tout de même prévoir le cas clairement dans le guide où un agent immobilier représentant un acheteur viendrait pour acheter le bien que l’avocat a à la vente. Il faudrait donc règlementer cette hypothèse de façon claire car il existe un réel risque de compérage.

A ce sujet :

            – soit nous acceptons le partage d’honoraires avec les agences et c’est clairement précisé et règlementé,
            – soit nous le refusons et il faut prévoir tous les cas.

Voici les premières observations que la CNA souhaitait porter à votre connaissance sur le guide.

Vos bien dévoués.

Louis-Georges BARRET
Président

Catherine SZWARC
Membre du Comité Directeur

 

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